Samedi 11 juillet. Le sénateur Léon Kengo wa Dondo, ex-président de la Chambre haute du parlement, est admis dans l’Ordre national des Héros nationaux Kabila-Lumumba, au grade de Grand Cordon, et quelques confrères de titrer, « Léon Kengo héros national lui aussi ».

Feu le Magistrat Yanyi Ovungu, Juge au Tribunal de Grande Instance de Kinshasa/Gombe décédé subitement lors du procès des 100 jours qu’il dirigeait a, lui également, été admis, à titre posthume, à cette même distinction des héros nationaux…

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Mai 2016 : la République Démocratique du Congo pleure Shungu Wembadio dit Papa Wemba. Le président Kabila décide de son élévation à titre posthume au grade de Grand Officier dans l’Ordre national… des Héros Kabila-Lumumba.

Malgré tout l’amour que lui voue le public congolais, il se murmure ici et là que c’est excessif. En fait, beaucoup pensent et disent qu’il a été proclamé héros national… comme Lumumba et Kabila, ce qui n’est pas exact.

En fait, depuis le 5 août 2002, l’Ordre national du Léopard a été supprimé et remplacé par une dénomination aussi alambiquée que confuse, « Ordre national des Héros nationaux Kabila-Lumumba ».

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Avec cette nouvelle appellation s’installe l’embrouillamini, l’imbroglio, le malentendu ; et le titre de « Héros national » est tellement prestigieux qu’il ne faudrait pas le faire apparaître à temps et à contretemps.

Léon Kengo wa Dondo, ‘‘héros national’’ de son vivant ?

Avec l’admission de Léon Kengo wa Dondo (et Yanyi Ovungu !) dans l’Ordre national des Héros nationaux Kabila-Lumumba, les mêmes interrogations et les mêmes ambiguïtés resurgissent.

Grand commis de l’Etat, Kengo mérite bien d’être distingué par la nation reconnaissante, mais est-il un héros national pour autant ?

Là est le problème. Yanyi Ovungu est mort dans des conditions troubles et choquantes comme beaucoup de compatriotes depuis 60 ans dans ce pays, mais… Comme pour Papa Wemba hier, la dénomination de cette distinction honorifique sème encore une fois la confusion et laisse songeur.

Le Chef de l’Etat et la Commission interministérielle interpellés

Une Commission interministérielle créée lors du conseil des ministres du 10 juillet par Félix Tshisekedi doit définir le statut juridique des héros nationaux  et déterminer, entre autres, « des avantages et des droits au profit des héritiers ».

Connaissant notre pays, il sera question (encore une fois) de voir combien de millions l’Etat devra débloquer chaque année pour les familles des uns et des autres…

Et bonjour les dégâts et les excès ! Alors que cette commission pourrait plutôt faire œuvre utile en planchant sur la correction de ce malentendu monstrueux que crée l’existence de cet Ordre national des héros nationaux.

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Il suffira, par exemple, de remettre en place l’Ordre national du Léopard (comme la distinction honorifique nationale avec ses différents grades) étant donné que le léopard est toujours l’animal-totem de notre pays (notre équipe nationale de foot n’a-t-elle pas récupéré ce nom après s’être appelée pendant quelques années « Simba » ?).

La remise en place de l’Ordre national du Léopard laissera l’Ordre des Héros Nationaux comme une distinction spéciale où ne pourront figurer que quelques rares personnes parmi celles qui ont offert leur vie pour la défense des intérêts et de la souveraineté de notre pays (ça ne peut pas être une foule !).

Attention aux clientélismes faciles !

Une telle clarification est devenue nécessaire si l’on ne veut pas que notre pays devienne celui où l’on trouvera le plus grand nombre de « héros nationaux » au kilomètre carré, le pays des mille héros nationaux, en somme. Et cela dévaluera à coup sûr la distinction honorifique.

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Voyons ce qui passe ailleurs. Là où cela existe, il y a un « héros national », très rarement deux. Ainsi, Agostinho Neto est le seul héros national officiel en Angola (il ne le serait peut-être plus si Jonas Savimbi avait renversé le pouvoir Mpla !). Jeanne d’Arc est unique chez les Français. Nelson Mandela, lui, n’a jamais été officiellement déclaré héros national en Afrique du Sud tout comme De Gaulle en France,  même s’ils sont de vrais « héros nationaux populaires ».

On ne peut pas, par simple clientélisme ou par simple paresse intellectuelle, laisser se pérenniser le malentendu du 5 août 2002, ou enfoncer la République Démocratique du Congo dans une étrange « exception congolaise » avec une kyrielle de héros nationaux… sans envergure héroïque!!