Tshisekedi va-t-il lancer une nouvelle coalition politique ou dissoudre le parlement ?

Tshisekedi va-t-il lancer une nouvelle coalition politique ou dissoudre le parlement ?

La nuit aura été bien courte et agitée dans les états-majors politiques et les tractations lancées depuis que Félix Tshisekedi a engagé un nouveau bras-de-fer avec ses alliés du Fcc continuent à agiter l’opinion.
On peut tout dire sur l’épisode de la prestation de serment des nouveaux juges de la Cour Constitutionnelle mercredi 21, en l’absence des deux présidents des chambres et de la majorité des députés, on peut supputer sur l’inélégance et l’illégalité de la démarche, ce « coup de force » de Tshisekedi (appelons le chat par son nom) lui redonne des ailes et un semblant de crédit dans une certaine partie de l’opinion. Dans les rangs des « bena-Udps », on voudrait bien que ce soit un changement radical des rapports des forces au sein de la coalition au pouvoir. Comme la direction batailleuse de son parti, Félix Tshisekedi a mis de côté les considérations juridiques et légales, il n’a vu que le combat politique à mener et à gagner à tous prix, à la congolaise. On sait quels tours cette façon de voir les choses a déjà joué à la république, on sait avec quelles astuces Joseph Kabila a prolongé indéfiniment ses mandats à la tête du pays, on sait comment on en est arrivé à la dictature mobutienne. Mercredi, dans le camp Tshisekedi, on ne pensait pas à tout cela, on ne pensait pas à la loi, on en était à la joie d’avoir infligé un bon coup à l’allié-ennemi.

La coalition kabiliste assommée

Côté Fcc, on est un peu groggy, sonné. On ne sait plus trop comment on pourrait encore éviter de perdre le contrôle de la Cour constitutionnelle, ce qui risque de donner du souffle et une certaine liberté de manœuvre au dangereux allié qu’est devenu Tshisekedi. Les communicateurs du Fcc ont tout de même indiqué que leur plate-forme ne reconnait pas les juges nommés et qu’elle ne se sentira en rien lié par les actes qu’il pourrait poser, on sent bien qu’ici, on ne peut pas aller plus loin. Le Fcc ne peut que réaffirmer sa volonté de poursuivre l’option « coalition » qu’elle avait choisie en lieu et place d’une « cohabitation » forcément plus difficile, plus polémique et plus disputée. Manière de calmer le jeu ? Certainement, parce que la mouvance kabiliste n’a pas pu encaisser le soufflet de Tshisekedi. C’est vrai que le président du Sénat Alexis Thambwe Mwamba s’est dit sceptique concernant une dissolution du parlement, mais hier, on apprenait que Joseph Kabila cherchait du secours en dehors du pays (auprès des présidents kenyan et sud-africain) tandis qu’Emmanuel Shadary et Néhémie Mwelanya faisaient plutôt profil bas.

Une nouvelle coalition pour balayer le FCC

Ce vendredi, c’est donc un Félix Tshisekedi requinqué qui va vouloir donner une nouvelle impulsion à son mandat. Ainsi, les observateurs attendent de grandes annonces, de graves décisions. Et d’abord, concernant la majorité parlementaire. Les stratèges de Tshilombo sont en train de supputer sur la meilleure manière de renverser Jeanine Mabunda et de prendre le contrôle du parlement. Si l’opération est compliquée, elle est tout à fait possible avec une classe politique « alimentaire », habituée à bouffer à tous les râteliers et sans consistance idéologique ou nationaliste. Comme manifestement, Ilunga Ilunkamba n’est pas prêt à jeter l’éponge, Tshisekedi va essayer de trouver une majorité qui surclasserait le Fcc : on voit Bahati Lukwebo piaffer d’impatience depuis quelque temps (rêvant certainement de jouer un rôle important dans une nouvelle coalition) mais l’on ne sait pas ce que vaut encore son regroupement ; on a vu Moïse Katumbi faire des œillades au camp Tshisekedi, relativisant toujours ce que d’autres leaders de Lamuka considéraient comme des péchés capitaux du pouvoir, restant conciliant à souhait (mais son rôle dans une future coalition risque d’être de l’ordre du symbole si on voit comment Katumbi est dans l’incapacité de mobiliser comme les autres têtes d’affiche de l’opposition). On a aussi évoqué ces derniers temps un rapprochement Tshisekedi – Bemba : si ce dernier rentrait dans une coalition avec l’Udps, ce serait une bonne prise pour le Président de la République car le poids politique du MLC est indéniable et l’action de Eve Bazaïba au sein de l’opposition, aux côtés de Martin Fayulu, a donné un énorme crédit au parti en l’absence de Jean-Pierre Bemba. Pour former la coalition entrevue dans le camp de Tshisekedi, on compte également sur les transfuges du Fcc. Beaucoup de membres de cette plateforme accusent le coup après avoir cru pendant longtemps que la Cour Constitutionnelle ne tomberait pas dans l’escarcelle de Tshilombo. A ce stade, soulignons que si le scénario d’une nouvelle coalition à mettre en place paraît idyllique, cela n’est qu’une apparence trompeuse. Une nouvelle coalition peut en effet bousculer l’équilibre interne d’un parti présidentiel très tribalisé et où les dirigeants n’ont pas vraiment le même poids politique que les possibles nouveaux arrivants à qui, forcément, il faut concéder beaucoup de choses pour qu’ils acceptent l’offre. Dilemme cornélien pour Tshisekedi.

Attention à « la grande muette », l’armée !

Le dernier problème, celui d’une nouvelle équipe dirigeante de la CENI, ne peut se résoudre que si l’on arrive à changer la majorité parlementaire. C’est vrai que certaines sources évoquent des pourparlers avec une structure de l’ONU qui appuierait le ministère de l’intérieur pour que celui-ci organise les élections législatives anticipées en lieu et place de la CENI. Là encore, l’Udps et son chef n’ont aucun contrôle sur les administrations provinciales, contrôlées presque partout par des gens de Joseph Kabila et du Fcc. C’est l’épine dans le pied de Tshisekedi. Mais, c’est vrai, Tshisekedi a réussi à ébranler ses adversaires du Fcc. Comme dans un combat de boxe, quand on a l’avantage sur son adversaire, les spectateurs tout comme les encadreurs techniques poussent leur poulain à achever l’adversaire. Cependant, on sait que l’avantage acquis lors d’un précédent round peut être balayé par un coup bien placé de son vis-à-vis qui change complètement l’issue du combat. Sans compter qu’ici, les différentes factions de l’armée congolaise n’ont pas encore rien dit alors que la situation est propice à un « arbitrage » de l’armée. Et en RDC, l’armée a toujours été accusée d’être un repaire d’étrangers infiltrés…

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